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« Si Cormac McCarthy avait le sens de l’humour, il aurait pu concocter une histoire comme Les frères Sisters, western sanglant, pétri d’un comique féroce. »
Los Angeles times
L’un des plus grands plaisirs que j’éprouve en lecture est celui de l’instant où, ma lecture du moment achevée, je me tourne vers le choix du prochain livre. Sans exagérer, ça me rend presque euphorique. Mais je recherche avant tout l’alternance d’un style littéraire à l’autre pour m’immiscer au cœur d’un voyage où je serai transportée par le dépaysement. À cent lieues de l’histoire d’amour à laquelle je venais d’échapper, par l’entremise d’un roman japonais un peu mièvre, je me suis retrouvée en plein cœur d’un western sanglant, assise au bar d’un saloon, pas trop loin d’un bordel et de l’amour d’un soir, entourée de whisky, de viande de bison et de pain ranci, d’un écho de duel aux pistolets et de deux tueurs à gages, les frères Sisters : deux brutes de la pire espèce, truands et bandits, à l’allure dégingandée. Et n’allez surtout pas croire qu’il fut de tout repos de voyager auprès d’eux !
Envoyés aux trousses d’un chercheur d’or, ils feront la route de l’Oregon jusqu’en Californie, en compagnie de leurs fidèles chevaux, Tub et Nimble (clin d’œil à Jolly Jumper et Lucky Luke, version gangster de la pire espèce). Chaque village traversé donnera lieu à des rencontres pour la plupart peu amicales. En ces 500 pages, j’ai aussi croisé une sympathique araignée venimeuse, qui m’a rappelé celles du désert du Mojave en Arizona. Eh oui, celle-ci avait fait pénétrer son poison mortel dans l’orteil de l’un des frères qui, visiblement, les affectionnait autant que moi! Autrement, ce livre est teinté d’un humour ironique et absurde. Je me suis surprise à quelques reprises à éclater de rire. Quelques questionnements colorent la route, et pour n’en nommer que quelques-uns… qu’est-ce qui fait un grand homme? La richesse? La force de caractère? Celui qui ne perd jamais son sang-froid? L’auteur répondra ainsi :
« Le grand homme, c’est celui qui sait repérer un vide dans le monde matériel, et le combler avec l’essence de lui-même. Le grand homme c’est celui qui sait attirer la chance en un lieu qui en était dépourvu auparavant, par la seule force de sa volonté. Le grand homme, enfin, c’est celui qui sait faire quelque chose en partant de rien. »
Finalement, l’auteur rend compte de l’hystérie qui entoure la ruée vers l’or, du désir de richesse, de s’emparer du bien d’autrui. Plusieurs réflexions pivotent autour de ce thème. Mais aussi autour de l’esprit humain, empli de curiosité et de persévérance, d’aventure et de labeur, ainsi que de soif de liberté. Franchement, j’ai parcouru ce roman avec beaucoup d’enthousiasme. Et pour être dépaysée, je l’ai été pleinement, c’est le moins qu’on puisse dire! Certaines critiques de la presse ont dit de ce livre « Imaginez Mark Twain sur l’acide. Complètement déjanté… », « Western terriblement imagé, digne d’un film des Coen », « À bien y penser, c’est un peu du Tarantino »…
Les frères Sisters ou comment devenir gangster !