« L’homme est le sel de la terre »
Il arrive que certaines rencontres changent quelque chose en nous. Comme un cadeau venu du ciel, j’ai eu ce privilège en empruntant un chemin qui m’a menée à marcher sur les pas de l’homme, les deux pieds enfouis dans « Le Sel de la Terre ». Sur ma route, j’ai croisé l’œuvre photographique du grand brésilien Sebastião Ribeiro Salgado et j’ai su que ma vision de l’humanité venait d’être ébranlée dans ses fondements les plus profonds.
« Un photographe est quelqu’un qui écrit avec la lumière et dessine le monde avec des ombres »
En prenant part à ce documentaire, réalisé par son fils Juliano Ribeiro Salgado et Wim Wenders, photographe allemand, j’ai pris conscience plus que jamais des étendues insoupçonnées du monde qui nous entoure. De sa beauté et de ses souffrances. De ses drames et de ses richesses. De ses édifications et de ses fractures. Le photographe a voulu que nous nous sentions concernés par l’ampleur des bouleversements qui marquent notre planète. Que nous soyons émerveillés, tout autant qu’horrifiés, par ses 40 ans d’images captées sous l’œil témoin de son objectif, dans une volonté de mieux saisir les enjeux auxquels l’humain fait face. Que nous réalisions que nous avons notre part de responsabilité dans ce chaos. Que s’éveille notre conscience collective face à ces désastres qui frappent le vaste monde que nous partageons. Que nous saisissions enfin les motivations de l’homme vis-à-vis son prochain et sa force d’intelligence dans le processus d’adaptation à son milieu.
« Plus que jamais, je sens que la race humaine est « une ». Au-delà des différences de couleur, de langue, de culture et de possibilités, les sentiments et les réactions de chacun sont identiques. Les gens fuient les guerres pour échapper à la mort ; ils émigrent pour améliorer leur sort ; ils se forgent de nouvelles existences dans des pays étrangers, ils s'adaptent aux pires situations… »
Le chemin qu’il nous amène à emprunter fait écho aux réflexions d’un homme qui a côtoyé les pires tragédies et les plus grands bouleversements des dernières décennies. Qui a fait le tour de la planète et vécu les guerres, les génocides, les exodes… et vu de ses propres yeux les conditions difficiles auxquelles sont exposés les migrants, les mineurs, les victimes de famine, etc. Qui a vécu avec les Touareg, le peuple Yali de Papouasie Occidentale, en plein cœur du génocide Rwandais, avec les travailleurs de la Mine d’or de la Serra Pelada (un de ses reportages les plus prisés), traversé la Mer de Sibérie orientale, le Soudan, l’Équateur, le Pérou, la Bolivie, l’Arctique, l’Antarctique, l’Amazonie, bref le bout du monde, de l’est à l’ouest, du nord au sud, de parallèles en méridiens. Un ensemble de réflexions en ont découlé et l’ont mené à la triste conclusion que les hommes sont incapables de vivre en collectivité…
« Je ne suis plus certain que les êtres humains soient vraiment faits pour vivre en communauté, je ne suis pas sûr que nous puissions survivre en tant qu'espèce »
Si Le Sel de la Terre est un film documentaire consacré à l’œuvre de Sebastião Ribeiro Salgado, il est avant tout l’écho intime d’un fils parti à la rencontre de ce père qu’il a très peu connu. L’hommage d’une vie dédié à l’un des plus grands photographes humanitaires au monde.
« En fait, l’histoire de mon père est celle d’un type qui trouve une fonction à sa photographie, qui va trop loin, qui craque, et qui, obligé de se réinventer, le fait d’une façon qui engendre beaucoup d’espoir »
Un grand moment d’émotions, de bouleversements, de larmes et d’émerveillement, un voyage intérieur au cœur de la Terre. Parfois dérangeant, mais toujours émouvant, Le Sel de la Terre a été présenté dans la sélection « Un certain regard » du Festival de Cannes 2014 où il a remporté trois prix. Il a également remporté le prix du meilleur film documentaire aux Oscars en 2015…
Durée: 1h50
Plus qu’un coup de cœur, c’est un immense coup de foudre <3
« Au cours des ans, Sebastião Ribeiro Salgado a offert sa collaboration à plusieurs organisations humanitaires, dont l'UNICEF, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Médecins sans frontières et Amnesty International. Avec son épouse, Lélia Wanick Salgado, il se consacre à un projet de reforestation et de revitalisation communautaire dans l'État brésilien de Minas Gerais »